Les objets connectés, un nouveau souffle pour la microélectronique

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Filières & Métiers
Publié le lundi 27 novembre 2017
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Après avoir failli disparaître du territoire au tournant des années 2010, la microélectronique est sur le point de connaître un nouvel âge d’or en Paca. Décryptage d’un secteur désormais incontournable pour le progrès technologique.
Par Quentin Velluet

Voilà bientôt 40 ans qu’au pied de la montagne Sainte-Victoire, en Provence, des ingénieurs développent capteurs, puces, semi-conducteurs, cartes mémoire et autres microprocesseurs, profitant des ressources en silicium de la région. Autant d’objets peu connus des non-initiés, mais indispensables à bien des technologies qui ont révolutionné notre quotidien : carte de crédit, carte SIM, paiement sans contact, smartphone… Le secteur est historiquement implanté dans la zone industrielle de Peynier-Rousset, à 38 kilomètres au nord-ouest de Marseille. La zone héberge 130 entreprises qui emploient 7 000 personnes. Sa figure de proue, STMicroelectronics, un constructeur franco-italien coté au Cac 40, équipe notamment les derniers iPhones d’Apple. Mais la microélectronique marque aussi de son empreinte Gémenos, près d’Aubagne, où Gemalto, né en 2006 de la fusion entre la luxembourgeoise Gemplus International et la néerlandaise Axalto, produit des passeports biométriques pour les États, fournit des cartes bancaires à des millions de personnes et des plateformes logiciels à des banques et des entreprises.

Micro Paca 2020

Jusqu’au tournant 2010, la microélectronique était partout en Paca. Mais entre 2010 et 2015, le secteur en mal d’innovation a connu un passage à vide. Plusieurs têtes d’affiche ont fini par quitter la région ou tout simplement disparaître. LFoundry, qui comptait 700 salariés sur la zone de Rousset, a été liquidée en 2013 après 30 années d’activité. L’Américain Texas Instruments, a quitté ses usines de Sophia Antipolis la même année. Intel a suivi le mouvement en 2016. Nvidia et Samsung aussi. Une hécatombe qui a forcé en 2015 la région à réagir pour redynamiser le secteur. Sa solution, le plan Micro Paca 2020, qui a notamment pour but d’accompagner les petites entreprises du secteur dans leur développement. Les Marseillais d’ABC SmartCard, concepteurs d’équipements hardware et de logiciels pour le sans contact sont actuellement accompagnés par les équipes du pôle de compétitivité SCS, en charge du projet. Les thermostats connectés Ween, après s’être fait remarquer au CES de Las Vegas en 2016, sont également suivis par les équipes du pôle. D’autres missions du plan visent à développer des partenariats avec l’international et faciliter les synergies avec le secteur des objets connectés. Grâce à cette initiative, 1 000 emplois devraient être créés d’ici 2020.

Le nouvel âge d’or de la microélectronique

C’est dans les objets connectés que la microélectronique devrait trouver son salut. Car contrairement à ce que certains croient, ce savoir-faire n’appartient pas au passé. Loin de là. Sans lui, pas de capteurs dans les usines pour mieux contrôler la production, pas de puces pour transférer des données, pas de cartes mémoire pour les sauvegarder, ni de microprocesseurs pour insuffler un peu d’intelligence à un objet du quotidien. En fait, sans microélectronique, pas d’objet connectés (IoT) puisque le secteur est à la fois inhérent, indispensable et dépendant de l’explosion du marché de l’IoT. Une bonne nouvelle pour la région Paca où l’IoT représente déjà un chiffre d’affaires d’1,2 milliard d’euros par an, que se partagent 26 PME et 75 start-ups et TPE. Autant de signaux positifs qui devraient donner envie aux cadres de la région, et à ceux qui lorgnent les belles côtes du Sud, de se tailler leur part du gâteau.

L’industrie automobile, partenaire idéale

Une filière en particulier va porter ce développement. C’est l’automobile et plus précisément l’aide à la conduite : « Renault vient d’implanter un centre de R&D spécialisé dans les logiciels embarqués à Sophia Antipolis. 162 ingénieurs ont été recrutés. Tous des anciens d’Intel », témoigne Georges Falessi, directeur général du Pôle SCS. Selon lui, les constructeurs automobiles souhaitent internaliser ce genre de compétences pour éviter de sous-traiter. Ils ont trouvé leur eldorado en Paca, une région qui regorge de profils nécessaires à leurs besoins. « Les laboratoires de recherche locaux travaillent en ce moment avec Volkswagen et Audi », confie Georges Falessi. Sans citer de projet précis, le directeur du Pôle SCS sous-entend que d’autres constructeurs ont prévu d’installer ce type d’activité dans la région dans les mois ou les années qui viennent. Une piste à surveiller pour les ingénieurs en quête d’opportunité. Si ces gros poissons parviennent à attirer des profils expérimentés, ce n’est pas le cas des PME. « C’est le gros problème ici, les PME ont de quoi attirer les jeunes diplômés, mais ce ne sont pas eux qu’elles recherchent en priorité. Elles préfèrent des profils opérationnels, donc expérimentés », souligne le directeur du pôle SCS.

Vers la cybersécurité

Alors que les gros acteurs ont fini par jeter l’éponge, d’autres entreprises plus réduites sont parvenues à se transformer en se spécialisant sur des activités corollaires de la microélectronique. C’est le cas d’Inside Secure, autrefois spécialisée dans les puces NFC et les semi-conducteurs, qui a récemment cédé ses activités pour se concentrer sur les logiciels de sécurité informatique et des licences de technologie. La cybersécurité est en effet une filière qui a toujours existé chez les acteurs de la microélectronique et dans laquelle il est facile pour eux de se reconvertir. Inside Secure a levé 16 millions d’euros à la fin de l’été 2017, ce qui lui permet de croître en rachetant des concurrents mais aussi d’ouvrir un poste de responsable communication et de recruter 5 à 6 ingénieurs. L’une de ses particularités : 90 % de ses 170 salariés dans le monde ont un profil ingénieur. « Même au marketing, nos collaborateurs sont ingénieurs de formation car il leur faut comprendre le produit pour travailler dessus », explique Loïc Hamon, vice-président d’Inside Secure. Si l’entreprise a choisi de se recentrer sur la cybersécurité c’est parce que la compétition dans les semi-conducteurs devenait intenable : « Nous étions en concurrence avec des mastodontes sur un marché mondialisé », se rappelle Loïc Hamon. « En 1995, on travaillait sur des réseaux privatifs pour le secteur bancaire et sur la mise en place de systèmes d’information pour les gouvernements. On travaillait déjà sur la gestion et la vérification d’identité numérique. C’était de la cybersécurité qui ne disait pas son nom. Aujourd’hui elle est le fil rouge de l’IoT automobile, de l’industrie 4.0, de l’énergie, de la smart city ou encore des maisons intelligentes », résume Stefane Mouille, vice-président d’Eurosmart, une association internationale qui rassemble les acteurs du secteur.