Paca : les autres facettes d’une région touristique

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Actualités et conseils sur les carrières en méditérannée
Territoires
Publié le lundi 27 novembre 2017
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Incontournable sur le territoire, le tourisme n’est pourtant pas le secteur qui emploie le plus de cadres en Provence-Alpes-Côte d’Azur et en Corse. À côté des plages et du soleil, les services et les nouvelles technologies façonnent aussi l’identité d’une région aussi riche que diverse sur le plan économique.
Par Régis Delanoë

Géographiquement, les régions Provence-Alpes-Côte-d’Azur et Corse – réunies par l’acronyme « Pacac » – ont été gâtées par Mère Nature : une côte méditerranéenne magnifique, une mer chaude, du soleil la plupart de l’année, les contreforts des Alpes… Forcément, les touristes ne s’y trompent pas et viennent chaque année par millions, notamment en été, générant sur place une économie importante et incontournable. Pour Maurice Wolff, vice-président de la CCI Marseille- Provence, elle reste même « un moteur de l’économie locale, une valeur sûre relativement peu impactée par les aléas économiques » et donc peu sensible aux crises. Quelques chiffres permettent de bien mesurer ce particularisme régional et l’importance du tourisme comme tête de gondole de l’économie locale : 30 millions de séjours touristiques y sont constatés en moyenne chaque année, générant 18 milliards d’euros de recettes annuelles et 140 000 emplois, dont 120 000 salariés d’après les derniers chiffres du Comité régional du tourisme « C’est près de 10 % des emplois salariés de la région », signale Rémi Belle, chef du service études statistiques à la Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (Direccte).

Le tourisme : très peu d’emplois cadres

Mais le problème du secteur touristique pour les cadres, en Pacac comme ailleurs, c’est qu’il génère dans sa grande majorité des emplois saisonniers et peu qualifiés. « Prenez le Var : il s’agit du premier département touristique de France après Paris, mais l’activité économique liée à l’accueil des visiteurs n’offre que peu d’opportunités pour des profils cadres », note Manon Fortias, conseillère municipale à la mairie de Toulon, spécialiste de l’enseignement supérieur et de la recherche. Elle observe néanmoins le développement depuis quelques années de l’activité croisiériste, ouvrant à de belles perspectives d’avenir : « Sa croissance est à deux chiffres et quelques start-ups locales commencent à s’intéresser au volet numérique de ce croisiérisme. Comment améliorer les conditions d’accueil des visiteurs ? Leur faire découvrir un territoire et consommer en un temps limité ? » Les réponses à ces questions restent encore largement à imaginer.
Non loin du Var, la ville de Cannes constitue également un spot touristique incontournable. « Une cinquantaine d’événements nationaux et internationaux y sont organisés tout au long de l’année, ce qui vient atténuer l’aspect saisonnier de l’activité, éclaire Frank Chikli, délégué au développement économique et à l’emploi de la ville de Cannes. Pour les cadres, il y a effectivement peu de volumes d’emploi mais quelques opportunités subsistent néanmoins : à des postes en stratégie commerciale, de management d’hôtel et de restaurant, de cadres-dirigeants, mais aussi en marketing ou en finances. » Des groupes d’hôtellerie et d’accueil pour touristes comme Odalys ou les villages vacances VTF sont présents dans la région et peuvent mener à de belles carrières pour les rares privilégiés.

Une région de services, un eldorado pour les cadres

Au-delà du tourisme, c’est le très vaste secteur des services qui génère le plus d’emplois cadres dans la région. « C’est même l’une des régions les plus servicielles de France, avec huit emplois sur dix dans ce secteur, pointe Rémi Belle. À l’inverse, l’industrie ne concentre que 8 % des emplois en Pacac, contre 12 % en moyenne nationale. » En mars dernier, l’Apec a livré les résultats de sa grande enquête régionale concernant l’emploi, permettant
d’affiner ces chiffres. Il s’avère que pour les fonctions cadres, les services concentrent 72 % des recrutements dans la région, un chiffre en hausse de 2 points par rapport à l’année précédente.
« On dénombre 215 000 cadres en Pacac, constituant 7 % des effectifs de cadres en France, décrypte Bruno Jonchier, délégué régional de l’Apec. La région possède également un taux d’encadrement de 18 %, parmi les plus hauts en France, et effectivement une forte domination du secteur des services, plus qu’ailleurs dans le pays. »
Dans le détail, l’étude permet d’affiner les prévisions de recrutement dans le vaste secteur des services. À eux seuls, les métiers de l’informatique concentrent 22 % des projets de recrutements de cadres dans la région en 2017, devant le commercial et le marketing (20 %). La finance et la comptabilité atteignent les 7 % de prévisions d’embauche, tout comme l’administration, le juridique, les RH et la communication. Au-delà de l’étude statistique et comptable, Pierre-Louis Cisamolo confirme sur le terrain que la région a tout d’un eldorado pour de nombreux profils cadres : « Nice et Monaco constituent par exemple un pôle bancaire important avec de belles opportunités pour des directeurs financiers, des analystes, des gestionnaires d’actifs, etc. »
Dans le secteur médical, paramédical et le service à la personne, le développement économique est important, avec la présence sur place d’une population plus âgée et plus fortunée que la moyenne nationale, prête à mettre le prix dans les services de soins et de bien-être. Cadres infirmiers, coordinateurs médicaux, chefs de service, responsables de secteurs et directeurs de structure ont de beaux jours devant eux.
Sur le plan géographique, la région se caractérise par un territoire économique très morcelé voire éclaté, indique Pierre-Louis Cisamolo, directeur senior de Michael Page dans la région :
« C’est à la fois un avantage et un inconvénient. Un avantage car les zones d’emploi sont bien identifiées, un inconvénient car entre ces zones, c’est le désert et elles communiquent peu entre elles. » Ces zones d’emploi justement, quelles sont-elles ? Bruno Jonchier pour l’Apec en distingue cinq majeures : « Par ordre d’importance, Marseille-Aubagne, Aix-en-Provence, Nice, Cannes- Antibes et Toulon. À elles seules, elles regroupent 80 % des cadres de la région. » Quant à la Corse, si elle n’a pas eu d’étude statistique aussi précise pour les recenser, on estime qu’il vit sur l’île entre 2 000 et 3 000 cadres.
« La forte présence des services dans l’économie locale est un atout considérable, conclut Maurice Wolff. Cette particularité nous a permis de moins subir la crise de 2008, comme les précédentes d’ailleurs, et doit nous permettre d’envisager l’avenir avec sérénité. »

Le nouveau moteur de l’économie numérique

La grande tendance actuelle en Pacac, c’est le développement de l’économie numérique. Historiquement, la région possède quelques belles réussites en matière d’informatique traditionnelle. Parmi les incontournables, on peut notamment citer la présence d’Amadeus à Sophia Antipolis, ou bien encore de STMicroelectronics du côté d’Aix-en-Provence. Ce sont d’ailleurs autour de ces deux pôles géographiques que l’on retrouve la majeure partie des entreprises de ce secteur (Lire article page 20 sur les autres pépites de la French Tech). Une troisième zone d’emploi en matière d’informatique et de nouvelles technologies est néanmoins apparue au cours de la dernière décennie, avec la constitution du pôle Toulon Ruche Digitale, labellisé French Tech et qui, comme son nom l’indique, forme une pépinière très dynamique de l’économie numérique, avec quelques pépites comme Swello, Audito, Oplead ou encore Cobaturage, première plateforme de covoiturage en bateau. « Les jeunes talents de l’économie numérique doivent profiter de notre ouverture vers le maritime pour imaginer les services de demain », souligne Manon Fortias, de la mairie de Toulon.

Les Bouches-du-Rhône restent aussi un département actif dans le développement de l’informatique et des télécoms. « Le secteur dans son ensemble rassemble environ 40 000 salariés dans le département », estime Maurice Wolff, de la CCI Marseille-Provence. Signe de ce dynamisme, l’organisation récente de la troisième édition du forum Smart City Marseille Méditerranée, en présence de Jean-Claude Gaudin, le maire de la ville. Une édition marquée par une thématique aussi ambitieuse que séduisante : « L’hypermétropole : quelle ville-monde à l’horizon 2030 ? » Rien qu’à Marseille, ville également labellisée French Tech, 7 200 entreprises du numérique sont recensées, un chiffre sensiblement équivalent à celui constaté chez les voisins d’Aix-en-Provence. Parmi les plus belles réussites locales, Pierre-Louis Cisamolo pour Michael Page souligne la présence
« de Digitick à Marseille et de Voyage Privée à Aix ». Cette dernière emploie désormais 500 personnes. Sans surprise, c’est dans le numérique que les cadres sont le plus recherchés : « Nous constatons une forte pénurie récurrente en compétences techniques bien spécifiques web et Java, en développeurs et dans les métiers de l’édition de logiciels », observe Nicolas Brivois, directeur régional de la région Sud chez Hays. Des besoins constatés à Marseille, Aix-en-Provence mais aussi à Sophia Antipolis, où se concentrent également un grand nombre de start-ups et de belles entreprises de l’économie numérique.

Mais la nouveauté la plus surprenante et aux perspectives les plus intéressantes concerne très certainement le big data et la place forte qu’est en train de devenir Marseille en la matière. « C’est un atout dont peu de gens ont encore pris conscience, mais Marseille est sur le point de devenir un hub de connexions internationales, avec des câbles sous-marins qui vont jusqu’en Afrique et en Asie, constituant un important potentiel de développement dans les activités liées au stockage de données », indique Pierre-Louis Cisamolo (Lire l’article page 16 « Aix-Marseille, royaume de la data »). Le géant du e-commerce Amazon réfléchirait ainsi à l’ouverture prochaine sur place de son futur centre de stockage de données, avec potentiellement d’importants besoins futurs en profils informatiques spécialisés dans le big data : data scientists et data analysts en premier lieu.

L’industrie, un secteur à ne pas négliger

En France, lorsqu’il s’agit de désigner des régions à fort ancrage industriel, citer Provence-Alpes-Côte d’Azur n’est pas le premier réflexe. Et pour cause : le poids de l’industrie dans l’économie locale est moins important que dans le reste du territoire national. « L’industrie concentre 8 % des emplois en Paca, contre 12 % en moyenne nationale. Ce n’est que la onzième région industrielle de France », développe Rémi Belle. Pour ce qui est plus spécifiquement des cadres, les chiffres de l’Apec viennent nuancer ce constat. « Entre 12 et 15 % des cadres de la région travaillent dans l’industrie », indique ainsi Bruno Jonchier, son délégué régional. Il y aurait donc encore des opportunités de carrières dans l’industrie pour des profils cadres installés dans la région.

Géographiquement, les emplois industriels sont « essentiellement concentrés à l’ouest de la région, dans un triangle formé par les villes d’Orange, d’Arles et de Marseille », explique Rémi Belle. C’est dans cette zone qu’on trouve également les villes de Martigues, Marignane, Istres et Fos-sur-Mer, qui entourent l’étang de Berre où se situent effectivement un grand nombre d’entreprises industrielles parmi les plus importantes de la région : sidérurgique avec ArcelorMittal, aéronautique avec Airbus Helicopters, transport maritime avec CMA CGM, chimique avec Naphtachimie, ou énergétique avec le centre d’études de Cadarache.

À l’exception notable de l’automobile, toutes les formes d’industries sont présentes dans la région et les exemples de belles réussites ne manquent pas. À Manosque, le laboratoire et l’usine de L’Occitane emploient 1 000 personnes. À Toulon, premier port militaire de France, l’industrie navale n’est pas seule, avec la présence notamment de l’équipementier industriel CNIM, du nouveau site d’implantation de Transfix, fabricant de transformateurs électriques, ou encore d’ECA, spécialiste des systèmes robotisés. À Cannes, le siège social et l’usine d’intégration de Thales Alenia Space concentrent 2 000 salariés, ce qui en fait le premier employeur des Alpes-Maritimes. Sans oublier l’industrie textile (Kaporal, Le Temps des Cerises, American Vintage, Captain Tortue…), le cosmétique et la parfumerie à Grasse et Avignon (Naturex) et même jusqu’en Corse, où Corse Composites Aéronautiques (CCA) emploie 190 salariés et génère 48 millions d’euros de chiffre d’affaires annuel.

« Les besoins en cadres dans l’industrie sont situés dans l’ingénierie, la qualité, la R&D mais aussi quelques compétences de pointe en high-tech, notamment en pétrochimie et dans les énergies nouvelles », pointe Bruno Jonchier. Pour fonctionner au quotidien, ces entreprises ont également toutes besoin de talents dans les fonctions support, « avec des opportunités régulières en finance, comptabilité, contrôle de gestion, RH et communication, entre autres », conclut Pierre-Louis Cisamolo pour Michael Page.

Le frémissement de la Silver Économie

La Silver Economie désigne l’ensemble des activités économiques liées aux seniors et à l’allongement de leur durée de vie. Quels services leur proposer pour vivre mieux et plus longtemps, continuer à consommer, à s’amuser et à bien vieillir avec des prestations adaptées ? Un business du troisième âge, encore appelé « or gris » pour ceux qui ont commencé à se pencher sur les potentialités futures de cette filière encore très récente. « Il y a incontestablement un frémissement, et la région doit logiquement en être une des locomotives », souligne Rémi Belle, de la Direccte. La raison ? Provence-Alpes-Côte-d’Azur concentre à elle seule 10 % de la population de plus de 75 ans. Entrepreneurs et start-uppers du secteur ne doivent pas manquer le virage de l’entrée des baby-boomers dans l’ère des seniors.

Construction : gros chantier en cours

Quand le bâtiment va, tout va. L’adage est bien connu et se vérifie en tout cas ces derniers mois en Provence-Alpes-Côte d’Azur où la reprise économique constatée s’accompagne de gros chantiers de BTP. Nicolas Brivois pour Hays constate « un vrai dynamisme dans ce secteur d’activité grâce à des projets imposants comme l’extension vers la mer de Monaco, le réaménagement du port de Marseille, la rénovation du quartier de la Belle de Mai, également à Marseille ou bien encore le contournement de la gare TGV d’Aix-en-Provence ». Autant de lieux où les cadres du BTP tels que les conducteurs de travaux, directeurs de travaux et ingénieurs commerciaux s’avèrent précieux. En Pacac, le BTP représente entre 7 et 8 % des emplois cadres.